En 1935, Mississippi, un sacré gars répondant au nom d'Edward R. Cochran décide de laisser toute sa vie derrière lui pour arpenter les chemins poussiéreux de son âme et ceux de l'Amérique pour vivre sa passion du blues à fond. Il n'en a plus rien à faire du petit qui va naître et encore moins de la femme qui le porte, ce qu'il veut c'est explorer ses tripes grâce à ses cordes vocales et de guitare. Il est plus ou moins conscient d'avoir un don pour le blues, fredonne quelques airs désenchantés et secs comme la vie le long des routes en quête d'un hypothétique public qui serait acquis à la cause de son art.
Bien conscient qu'un diamant à l'état brut n'est qu'un trésor enfoui sous terre, il va s'enrichir de rencontres marquantes, fabuleuses comme celle de la légende blues Robert Johnson au rythme de sa guitare, des filles d'un soir et de quelques éclairs de whisky dans le gosier. Si le frisson de l'aventure le pousse sans cesse à aller de l'avant, à ne jamais perdre espoir, il éculera ses fonds de culotte à se faire embaucher dans les cabarets les plus sombres, peu recommandables, gérés par des bonshommes duplices... peu importe tant que son blues vibre, il vibre aussi et le public attentif à ses efforts saura plusieurs fois le récompenser de regards interdits, admiratifs et quelques onomatopées prometteuses de succès futurs. La route sera pourtant pénible, jamais droite, toujours infléchie par des putain de vicissitudes qui font le code génétique des vrais bluesmen. Peut-être le confort de la vie qu'il a laissé derrière lui empêchait de prendre cet envol sublime mais complexe.
Frantz Duchazeau, à travers l'excellence de son trait (madre mía quelle maestria !!) et l'exemplarité presque pédagogique sur le blues et son histoire, réussit un coup de maître... quiconque jette un œil sur ce magnifique album sera magnétisé par le fabuleux traitement des ambiances, le rendu des décors ; tant est si bien que n'y connaissant personnellement pas grand chose sur le blues j'ai vraiment eu l'impression parfois d'avoir vécu non loin de l'histoire de ce genre, d'avoir aussi un peu vécu dans cette Amérique des années 30. Certes peut-être un peu trop comme on pourrait l'imaginer mais c'est ce qui en fait un ouvrage relativement facile d'approche sur le sujet même pour les néophytes. Les personnages sont tous attachants bien que la plupart d'entre eux soient faits de la chimie des losers, bien qu'ils soient les plus amoraux voire immoraux possible... on se plait à reconnaître que les failles du genre humain peuvent - quand elles sont magnifiées - le rendre plus beau, plus lyrique...
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