S'il y a quelque chose qui véritablement me casse les bonbons, et depuis des années jusqu'à me faire baver de folie et de rage, ce sont ces "français-qui-travaillent-plus-que-toi" qui vomissent sur les grévistes et protestataires de tout poil. Qu'ils aient 18 ans ou 74 printemps, je les abhorre. Je pense qu'ils ont à peu près autant de finesse que les cacahuètes qui remplissent l'estomac des piliers de bar-PMU dont ils empruntent la même philosophie. Il en est ainsi qu'il existe toujours une masse grégaire d'intellos des trottoirs pour nous expliquer que la grève "c'est injuste, c'est dégueulasse" et pour orner leur propos des milles anecdotes du "je suis arrivé en retard à mon boulot à cause de la grève et mon patron a pas apprécié" ou le fameux et lyrique "avec ces grèves, ceux qui veulent travailler, ben on est pris n'en n'otage, bah elle est belle la Fraaaaance, tiens !". Tout ça avec un faciès déformé par une haine rentrée.
A chaque fois je me dis : est-ce qu'ils comprennent vraiment ce qu'il se passe dans leur pays ou font-ils semblant d'être complètement cons ? A croire qu'ils pensent que la grève est un outil jovial et masturbatoire pour saler un peu le quotidien des fainéants (cheminots, profs et fonctionnaires en général). Déjà, il me semble de bon ton de re-préciser que la grève est légale, que ce n'est pas en soi un procédé de "chantage" mais un procédé de "pression" (non, ce n'est pas pareil...). C'est aussi, et arrêtez-moi si je me plante, le seul moyen pour un salarié ou un employé de secouer le drapeau du "oh, tu m'écoutes là maintenant ?". Oui, la grève c'est d'abord la conséquence d'un échec à toute tentative de dialogue. Quiconque a un peu d'expérience dans le monde du travail sait très bien que la grève n'arrive que très rarement dans les discussions a priori mais qu'elle s'organise dans un a posteriori de constat d'immobilisme. Les gens qui travaillent ne sont pas plus idiots que ceux qui pensent travailler plus qu'eux, ils savent très bien ce que s'engager dans la grève veut dire : malaise à montrer à son patron, son supérieur, que l'on apprécie pas ses méthodes, malaise à montrer qu'on vit mal sa façon de travailler, envie de lui montrer notre désaccord et coupure des revenus (oui, encore une fois, sans relâche, je précise qu'on retire la paye journalière du gréviste pour chaque jour sans travail, c'est logique). Il m'est arrivé plusieurs fois de faire grève moi-même pour des motifs divers et à chaque fois on pense un peu à tout ça. La grève, oui, est un constat d'échec. Vraiment ça serait bien de penser que ce n'est pas une arme pour embêter le peuple laborieux de la France qui se lève tôt au rythme des infos de RMC.
Alors, oui, la grève des trains, du RER, des profs et tout le toutim ça pose problème, ça crée des troubles dans le pays. En effet, ça complique le trajet pour aller au boulot de plein de gens, ça en oblige d'autres à trouver un moyen de garder leurs enfants. Mais, justement, à voir le désordre que ça peut occasionner devrait faire prendre conscience à la belle France travailleuse que ces services-là sont indispensables, équilibrent le quotidien de tous... et qu'il est dommage qu'on s'en rende compte que quand ça ne marche pas. Quand des gens sont prêts à se priver de journées de salaire/traitement pour se faire entendre sur les conditions de leur boulot c'est qu'il y a un véritable problème. Depuis des années les cheminots lancent des mouvements de grève répétés. Les apôtres de Jean-Pierre Pernault voient en cela "une bande d'insatisfaits qui fait chier tout le monde" sans penser deux minutes que le problème vient aussi des gens au-dessus qui, manifestement, n'ont pas soit tenu leurs promesses, soit pas écouté du tout le mal-être de leurs employés. Pareil pour les profs, et je sais un peu de quoi je parle, ça fait des années que ceux-ci demandent plus de moyens (ça ne veut pas dire "on veut être mieux payés", il n'y a que les bœufs sourdingues pour comprendre ça !), plus de ressources humaines, pour exercer leur boulot dans des conditions juste décentes. Au lieu de ça on sucre des postes, ils se retrouvent avec des classes bondées dans des locaux qui vont leur tomber sur la tronche. Au final ceux qui trinquent ce sont les élèves et les parents à moyen terme... mais non, au lieu de ça, on ne pense qu'à sa petite gueule sur le moment.
Ensuite, je ne vois quel intérêt il y a à sans cesse cracher sur des gens qui essayent de tirer les conditions de travail vers le haut car tout le monde en profite au final. Celui qui chiale sans cesse parce qu'il va arriver 10 minutes plus tard chez lui à cause d'une grève des transports a profité, à la suite d'un long processus de conflits sociaux, des améliorations des conditions de vie et travail... qui peut être assez naïf pour penser qu'on obtient quelque chose sans le demander ? Qui peut être encore assez dupe pour penser qu'on obtient facilement ce que l'on demande ? Ces gens-là vivent dans le monde des Bisounours attendant que d'autres gueulent à leur place, prennent des risques à leur place, pour mieux s'en offusquer. Un mot un peu précieux résume cela : la couardise. Si tout ce beau monde est offusqué par les mouvements de grève, qu'il pousse le raisonnement jusqu'au bout et demande à vivre dans les conditions d'avant les choses obtenues par certains mouvements de protestation. Ils bosseront 45 heures par semaine payés des clopinettes... le "bon temps" nous diront-ils sans doute...
Dans le même état d'esprit, rien ne m'énerve plus qu'un jeune couillon de 18-25 ans pleure parce qu'il y a grève dans sa fac... lui qui a le cul vissé dans des amphis pas trop inconfortables, qui peut envoyer des mails depuis la B.U. grâce aux ordis installés dans la salle de lecture. Ce petit couillon pense que tout a été obtenu grâce au pouvoir des fleurs et à la seule générosité institutionnelle. Je me rappelle moi ma fac de langues prête à nous tomber sur la tête avec ses amphis qui puaient, les banquettes qui se faisaient la malle, les profs qui "gueulaient" dans leurs micros car ceux-ci grésillaient en sourdine en plus. En 1995 il y a eu un grand ras-le-bol qui m'a fait défiler une douzaine de fois dans les rues de Poitiers, on demandait plus de moyens, on secouait les bras pour que le Ministère réagisse un peu... on était même encouragés par les profs de tout bord politique d'ailleurs. Suite à cela, sans que la fac ne devienne un pôle high-tech non plus, celle-ci a obtenu (en même temps que d'autres facs en France) des moyens qui ont permis la réfection des amphis, un apport de matériel décent, un équipement pour les étudiants digne de ce nom... et les étudiants d'aujourd'hui chialent parce qu'il leur manque des heures de cours ? Que dire de la santé d'un pays le jour où les jeunes n'ont même plus ce réflexe parfois exagéré mais toujours sympa de s'énerver un peu contre leur condition, contre les Grands ? Ben oui, aujourd'hui ceux qui posent leurs fesses sur des banquettes pas pourries, installées après les mouvements de protestation, gueulent comme des vieux séniles adorateurs de Thatcher. On croit rêver... ou cauchemarder ! D'autant plus que bien souvent ceux qui gémissent pour des heures de cours perdues sont les mêmes à sécher les cours qui ne leur conviennent pas. Car tout est devenu consommation, absolument tout. Je consomme du train, je consomme du RER, je consomme du cours de fac, du cours de lycée. Tu me dois mon cours à moi, tu me dois mon train, mon RER... j'en ai rien à foutre de toi car le service que tu me rends m'appartient, j'y ai droit. Et si j'en veux pas, c'est pas ton problème, moi je consomme. C'est presque un droit divin puisque je suis le Dieu de moi et toi un sujet mortel dans ma sphère, à mon service à moi et pas au service de tous.
Quand on voit les choses évoluer comme ça, franchement, ça fait peur. Ce sont ceux qui te ferment la gueule dès la première tentative d'expression d'un malaise qui te demandent d'être plus compréhensif... et surtout donc d'aller chialer ailleurs parce que, eux, ils travaillent mieux que toi et sans se plaindre. Le problème c'est que si ces gens parfaites ne se plaignent pas au boulot, elles le font partout ailleurs.
Enfin, vraiment cette expression "on est pris en otage" est insupportable, je trouve que c'est le dernier des manques de respect pour ceux qui sont ou ont été dans l'angoisse de la vraie prise d'otage... celle où à chaque seconde on se dit que son ravisseur va peut-être nous buter. Il y a des comparaisons terriblement malheureuses. Ceux qui font ça sont les mêmes qui comparent n'importe quelle petite restriction à des méthodes de nazis.
A chaque fois je me dis : est-ce qu'ils comprennent vraiment ce qu'il se passe dans leur pays ou font-ils semblant d'être complètement cons ? A croire qu'ils pensent que la grève est un outil jovial et masturbatoire pour saler un peu le quotidien des fainéants (cheminots, profs et fonctionnaires en général). Déjà, il me semble de bon ton de re-préciser que la grève est légale, que ce n'est pas en soi un procédé de "chantage" mais un procédé de "pression" (non, ce n'est pas pareil...). C'est aussi, et arrêtez-moi si je me plante, le seul moyen pour un salarié ou un employé de secouer le drapeau du "oh, tu m'écoutes là maintenant ?". Oui, la grève c'est d'abord la conséquence d'un échec à toute tentative de dialogue. Quiconque a un peu d'expérience dans le monde du travail sait très bien que la grève n'arrive que très rarement dans les discussions a priori mais qu'elle s'organise dans un a posteriori de constat d'immobilisme. Les gens qui travaillent ne sont pas plus idiots que ceux qui pensent travailler plus qu'eux, ils savent très bien ce que s'engager dans la grève veut dire : malaise à montrer à son patron, son supérieur, que l'on apprécie pas ses méthodes, malaise à montrer qu'on vit mal sa façon de travailler, envie de lui montrer notre désaccord et coupure des revenus (oui, encore une fois, sans relâche, je précise qu'on retire la paye journalière du gréviste pour chaque jour sans travail, c'est logique). Il m'est arrivé plusieurs fois de faire grève moi-même pour des motifs divers et à chaque fois on pense un peu à tout ça. La grève, oui, est un constat d'échec. Vraiment ça serait bien de penser que ce n'est pas une arme pour embêter le peuple laborieux de la France qui se lève tôt au rythme des infos de RMC.
Alors, oui, la grève des trains, du RER, des profs et tout le toutim ça pose problème, ça crée des troubles dans le pays. En effet, ça complique le trajet pour aller au boulot de plein de gens, ça en oblige d'autres à trouver un moyen de garder leurs enfants. Mais, justement, à voir le désordre que ça peut occasionner devrait faire prendre conscience à la belle France travailleuse que ces services-là sont indispensables, équilibrent le quotidien de tous... et qu'il est dommage qu'on s'en rende compte que quand ça ne marche pas. Quand des gens sont prêts à se priver de journées de salaire/traitement pour se faire entendre sur les conditions de leur boulot c'est qu'il y a un véritable problème. Depuis des années les cheminots lancent des mouvements de grève répétés. Les apôtres de Jean-Pierre Pernault voient en cela "une bande d'insatisfaits qui fait chier tout le monde" sans penser deux minutes que le problème vient aussi des gens au-dessus qui, manifestement, n'ont pas soit tenu leurs promesses, soit pas écouté du tout le mal-être de leurs employés. Pareil pour les profs, et je sais un peu de quoi je parle, ça fait des années que ceux-ci demandent plus de moyens (ça ne veut pas dire "on veut être mieux payés", il n'y a que les bœufs sourdingues pour comprendre ça !), plus de ressources humaines, pour exercer leur boulot dans des conditions juste décentes. Au lieu de ça on sucre des postes, ils se retrouvent avec des classes bondées dans des locaux qui vont leur tomber sur la tronche. Au final ceux qui trinquent ce sont les élèves et les parents à moyen terme... mais non, au lieu de ça, on ne pense qu'à sa petite gueule sur le moment.
Ensuite, je ne vois quel intérêt il y a à sans cesse cracher sur des gens qui essayent de tirer les conditions de travail vers le haut car tout le monde en profite au final. Celui qui chiale sans cesse parce qu'il va arriver 10 minutes plus tard chez lui à cause d'une grève des transports a profité, à la suite d'un long processus de conflits sociaux, des améliorations des conditions de vie et travail... qui peut être assez naïf pour penser qu'on obtient quelque chose sans le demander ? Qui peut être encore assez dupe pour penser qu'on obtient facilement ce que l'on demande ? Ces gens-là vivent dans le monde des Bisounours attendant que d'autres gueulent à leur place, prennent des risques à leur place, pour mieux s'en offusquer. Un mot un peu précieux résume cela : la couardise. Si tout ce beau monde est offusqué par les mouvements de grève, qu'il pousse le raisonnement jusqu'au bout et demande à vivre dans les conditions d'avant les choses obtenues par certains mouvements de protestation. Ils bosseront 45 heures par semaine payés des clopinettes... le "bon temps" nous diront-ils sans doute...
Dans le même état d'esprit, rien ne m'énerve plus qu'un jeune couillon de 18-25 ans pleure parce qu'il y a grève dans sa fac... lui qui a le cul vissé dans des amphis pas trop inconfortables, qui peut envoyer des mails depuis la B.U. grâce aux ordis installés dans la salle de lecture. Ce petit couillon pense que tout a été obtenu grâce au pouvoir des fleurs et à la seule générosité institutionnelle. Je me rappelle moi ma fac de langues prête à nous tomber sur la tête avec ses amphis qui puaient, les banquettes qui se faisaient la malle, les profs qui "gueulaient" dans leurs micros car ceux-ci grésillaient en sourdine en plus. En 1995 il y a eu un grand ras-le-bol qui m'a fait défiler une douzaine de fois dans les rues de Poitiers, on demandait plus de moyens, on secouait les bras pour que le Ministère réagisse un peu... on était même encouragés par les profs de tout bord politique d'ailleurs. Suite à cela, sans que la fac ne devienne un pôle high-tech non plus, celle-ci a obtenu (en même temps que d'autres facs en France) des moyens qui ont permis la réfection des amphis, un apport de matériel décent, un équipement pour les étudiants digne de ce nom... et les étudiants d'aujourd'hui chialent parce qu'il leur manque des heures de cours ? Que dire de la santé d'un pays le jour où les jeunes n'ont même plus ce réflexe parfois exagéré mais toujours sympa de s'énerver un peu contre leur condition, contre les Grands ? Ben oui, aujourd'hui ceux qui posent leurs fesses sur des banquettes pas pourries, installées après les mouvements de protestation, gueulent comme des vieux séniles adorateurs de Thatcher. On croit rêver... ou cauchemarder ! D'autant plus que bien souvent ceux qui gémissent pour des heures de cours perdues sont les mêmes à sécher les cours qui ne leur conviennent pas. Car tout est devenu consommation, absolument tout. Je consomme du train, je consomme du RER, je consomme du cours de fac, du cours de lycée. Tu me dois mon cours à moi, tu me dois mon train, mon RER... j'en ai rien à foutre de toi car le service que tu me rends m'appartient, j'y ai droit. Et si j'en veux pas, c'est pas ton problème, moi je consomme. C'est presque un droit divin puisque je suis le Dieu de moi et toi un sujet mortel dans ma sphère, à mon service à moi et pas au service de tous.
Quand on voit les choses évoluer comme ça, franchement, ça fait peur. Ce sont ceux qui te ferment la gueule dès la première tentative d'expression d'un malaise qui te demandent d'être plus compréhensif... et surtout donc d'aller chialer ailleurs parce que, eux, ils travaillent mieux que toi et sans se plaindre. Le problème c'est que si ces gens parfaites ne se plaignent pas au boulot, elles le font partout ailleurs.
Enfin, vraiment cette expression "on est pris en otage" est insupportable, je trouve que c'est le dernier des manques de respect pour ceux qui sont ou ont été dans l'angoisse de la vraie prise d'otage... celle où à chaque seconde on se dit que son ravisseur va peut-être nous buter. Il y a des comparaisons terriblement malheureuses. Ceux qui font ça sont les mêmes qui comparent n'importe quelle petite restriction à des méthodes de nazis.
Héhé, tu devrais tenir une chronique pour un journal.
RépondreSupprimerJe suis parfaitement d'accord et je n'ai pas grand chose à ajouter... Je pense exactement la même chose. Surtout avec les grèves récentes à la SNCF, je crois bien que de tout mon entourage, j'ai été le seul à ne pas avoir râlé un seul instant à ce propos là... pourtant je devais prendre quatre trains différents.
On avait l'air d'être traumatisé par l'idée que les trains soient annulés et que je sois en retard pour avoir les suivant et pourtant, je m'en foutais un peu dans le sens où si rater un train est le prix que j'ai à "payer" pour que ces gens se fassent entendre, ben ça me fait plaisir de le rater ce train. Les conversations que j'entendais dans les trains étaient affligeantes, tout le monde ne parlait que de ça, des emmerdeurs de grévistes qui pourrissent la vie des gens, qu'ils sont vraiment égoïstes et blablabla... autant de connerie autour de soi, ça donne presque envie d'être sourd (ou dans mon cas, d'avoir un bon casque au son puissant).
Disons que je peux comprendre que les gens soient agacées (après une pénible journée de boulot, ou parce qu'elles ont envie d'aller en vacances méritées ou qu'elles ne savent où mettre leur môme s'il n'y pas école) mais je n'aime pas le "jus idéologique" qu'ils en retirent de cet agacement. J'essaye - du mieux que possible - de me mettre parfois à la place de ceux qui font grève, notamment des cheminots et je me dis "bon sang, ils ne font pas ça pour faire chier le peuple mais pour défendre leur bout de viande"... seul problème : à la différence des cadres commerciaux, des négociants en vin, des cadres supérieurs et artisans bouchers, leur absence au travail rend compte du caractère indispensable de leurs compétences... un cadre sup se met en grève, franchement on s'en fiche, ça ne nous agace pas plus que ça car on ne sera jamais au courant, ça n'influencera pas mon quotidien... or, sa grève sera-t-elle plus légitime parce qu'elle n'emmerde personne ? Des bouchers qui se mettraient en grève, ça serait plus "juste" comme combat parce qu'ils ne bloqueraient pas le pays ? Le problème donc des cheminots et profs, c'est que quand eux font grève, ça se "voit", ça perturbe.
RépondreSupprimerLa France est devenue un pays de moules à toujours regarder ce qu'il y a dans l'assiette du voisin pour le dénoncer parce qu'il en a trop, au lieu plutôt d'essayer de remplir la sienne. Faut que les autres soient aussi malheureux que toi pour que ta vie soit supportable. On ne réfléchit plus, on agit toujours sous le coup de l'émotion et on réagit comme des balourds en cédant à la facilité et l'égoïsme. Moi je, moi je, moi je, partout... si l'autre à côté de toi peut crever sans bruit c'est pas plus mal, c'est lui qui te doit le respect et s'excuser, pas à toi de l'aider parce que, hein, il y a autre chose à faire...
A une époque je prenais très souvent le train et je me suis mangé des tas de grèves dans les dents et j'entendais les conversations dont tu parles. Parfois ça m'a mis dans de sacrées merdes de pas pouvoir prendre le train que j'avais prévu de prendre... ça me faisait pas plaisir, j'avais envie de tout casser. Mais j'ai toujours mis un point d'honneur à ne pas m'enflammer et pire encore lorsque les bœufs se déchainaient moi j'en rajoutais au point de dire que j'étais solidaire (bien que terriblement ennuyé par mes histoires de train !).
Je suis d'accord avec le contenu de ton article, surtout le paragraphe sur le fait que tout est devenu consommation. C'est terriblement vrai.
RépondreSupprimerLe droit de grève est un droit essentiel, et comme tu le soulignes, beaucoup trop de monde oublie que ce qu'on a aujourd'hui s'est obtenu bien souvent à coup de conflits.
Je regrette tout de même que pour certains corps de métier souvent en grève, en particulier la SNCF, les grévistes ne communiquent pas mieux sur les raisons de leur action. D'autant plus qu'un mouvement de grève à la SNCF, comme tu dis, ça se voit, ça perturbe. Il est donc essentiel que le mouvement soit lisible par les usagers. Or la base de leur action est toujours liée à une multitude de revendications : ça touche différents métiers (contrôleurs, conducteurs, personnel en gare, etc.), ça concerne le fret et/ou les retraites et/ou les salaires et/ou la sécurité, le pire c'est quand toutes ces revendications sont portées en même temps. D'un point de vue extérieur, ça peut vite devenir obscur, d'autant plus que pour se faire entendre de leur direction, ils sont obligés de multiplier les actions, et parfois une grève ne fait pas l'autre. Celle d'il y a un mois sera sur telle ou telle revendication, et la suivante portera sur autre chose. Je pense vraiment que les syndicats gagneraient à améliorer leur communication, au moins auprès de quelques usagers. La façon dont la direction gère aussi l'information en cas de grève, n'aide vraiment pas à ce que ce soit bien vécu par les utilisateurs.
Et puis, n'oublions pas que le gros problème de la SNCF, c'est que même sans mouvement de grève, elle souffre d'une réputation pas terrible et qui a tendance à se dégrader. Alors je sais qu'on n'a pas de quoi se plaindre au vu de la situation d'autres pays (notamment où ça a été privatisé), mais tout de même. Je prends très souvent le train et j'ai des tas et des tas d'anecdotes à raconter (mais c'est peut-être moi qui n'ai vraiment pas de chance ^^). Quand les mouvements de grève s'ajoutent aux problèmes habituels, l'agacement peut arriver vite.
Mais ceci ne peut expliquer la réaction que de certains râleurs, dont je fais sans doute partie. Je tente personnellement d'être solidaire de leurs actions, mais cela m'agace de ne pouvoir prendre le train sans avoir un problème quelconque (même si maintenant, j'ai tellement l'habitude que je prends ça avec philosophie). Je pense que pour quelques uns, ce n'est pas lié aux grèves, mais à un ras-le-bol plus général sur le fonctionnement de la SNCF.
Au final, il faut savoir faire la part des choses entre le désagrément que ça nous occasionne sur le coup et les revendications qu'ils entendent défendre. Ça permet de remettre un peu les choses à leur place.
Ben pour parler des trains, nous sommes - en France - et les chiffres parlent, le pays "riche" où il y a eu le moins d'accidents, de déraillements, de catastrophes ferroviaires et ce n'est pas dû du tout à un hasard... comme tu l'as pointé toi-même, les pays au réseau privatisé connaissent régulièrement des soucis graves car leur but n'est pas d'offrir un service mais de gagner de l'argent... du coup le côté "service" en a pris un coup là-bas, dans service il y a entretien, sécurité et politique de proximité. Essaye de prendre le train dans des pays au réseau privatisé, t'as déjà 3 fois moins de lignes qu'en France, les trajets sont souvent plus longs et pas forcément moins couteux. En France le réseau est très dense et mis à part les trajets est-ouest / ouest-est, transversaux, il est très facile de se rendre d'un point à un autre. En plus avec le TGV, même si c'est cher (mais oh, c'est une technologie de pointe, pas un pousse-pousse asiatique, ça coûte cher).
RépondreSupprimerMais certes les trains arrivent un peu plus à l'heure ailleurs et il y a moins de grève car si t'es pas content on peut un peu te virer comme ça, sans trop se justifier. Moi je préfère vivre dans un pays où je me dis que je suis sûr que mon train va pas dérailler plutôt que dans un où je suis sûr d'arriver à l'heure.
Ensuite, pour les mouvements de grève, faut pas uniquement voir les choses dans un sens. Les cheminots s'ils font grève c'est qu'ils sont mécontents de leur situation de travail et l'on peut penser que ce sont des grandes personnes comme tout le monde : comme les vendeuses, comme les coiffeurs, comme les chefs d'entreprise... ils n'ont pas le gène de l'imbécillité en plus. Cheminot, qui désigne comme tu le sais tous les métiers autour du train, c'est pas une sinécure. La pénibilité est certaine : contraintes horaires (pour les chefs de gare, pour les pilotes, pour l'entretien, vas-y toi bosser à 2h du mat' un jour, puis à 15h un autre), contraintes "familiales" (par ex. les chauffeurs de train ne rentrent pas tous chez eux le soir), contrainte du "résultat" (rapport difficile avec la clientèle qui d'entrée les a dans le pif, donc pression totale)... ensuite on leur dit, quand on les embauche, "avec nous, ça sera ça, puis vous aurez ça pour tant de temps", signez en bas du contrat... pour 2 mois plus tard que le patron annonce "ben non en fait, ça sera ça puis ça, et pas comme prévu, désolé et fermez votre gueule". Quel salarié supporterait de subir 150 changements de programme, d'évolution de carrière tous les 8 mois ?
Parce qu'il est là le problème, les mouvements de grève suivent la courbe des changements de stratégie des gouvernements (SNCF étant un service public, ce sont les hommes au pouvoir qui donnent la "ligne de conduite"). Tu peux pas promettre de discuter avec tes employés sur des points précis pour ensuite les enfumer, ne pas les écouter, et secouer l'opinion publique en disant "les méchants cheminots, ils pensent qu'à eux". Si déjà on s'était tenu de remplir les engagements passés il y aurait 3 fois moins de mouvements de grève... on dit aux cheminots "venez chez nous parce que pour la retraite ça va être comme ça" puis après on change les règles en plein milieu, ça s'appelle de la malhonnêteté et je trouve heureux que les lésés gueulent... après on dit on touchera pas aux horaires, jamais, et on leur retoque quand-même dans leur dos, sans consultation... ensuite on dit aux contrôleurs, "z'inquiétez pas, on va vous donner les moyens de pas vous sentir trop seuls", ils ne voient rien venir, on les enfume et on voit qu'en même temps que le prix du billet de train augmente sans voir les conditions de ceux qui bossent s'améliorer... après on leur dit "pour votre statut, pas d'inquiétude, ça sera pas retouché" et façon France Telecom on se rend compte qu'on veut changer le statut de tous, surtout des personnels les plus précaires pour donner un coup de "privatisation" dans le tas... et dans leur dos, en les prenant pour des goofies... ça me mettrait en colère... j't'assure qu'aucune autre profession en France, n'accepterait ces continuels revirements des gens qui les emplois... il y a un moment où il faut se rendre compte que les grèves sont provoquées AUSSI par les dirigeants qui font cyniquement l'inverse de ce qu'ils ont annoncé... moi ça me rendrait fou. La chance qu'ont les dirigeants de la SNCF c'est qu'ils peuvent s'appuyer sur le ras-le-bol d'une opinion publique à qui on n'explique jamais rien car expliquer serait les rendre solidaires des mouvements et mettre les "réformes" (quel mot pratique) en danger.
RépondreSupprimerJ'suis vraiment agacé par le fait qu'on présente les cheminots comme de potentiels privilégiés de la République, vivant un rêve éveillé, qui aurait le culot de demander "encore plus" de "privilèges". Faut vraiment être idiot pour penser qu'être cheminot c'est une fin en soi, un aboutissement, une vie de luxe. T'aimerait être dans une boîte dans laquelle on te dit "ben, vous gagnerez tant avec ça comme horaire mais ça comme compensation" pour ensuite 3 jours plus tard t'annoncer "bon, les horaires faut oublier là puis les compensations ce sont des privilèges, puis d'ailleurs tout le monde pense que ce sont des privilèges". Tu dirais rien toi ? Tu te mettrais pas en colère, autant de fois qu'il le faut sans n'avoir que faire des grognards qui te disent que t'exagères ?
Ouais, ça fait chier les problèmes de train, de la même façon que les routiers bloquent les routes... mais c'est le seul moyen de se faire entendre. La multiplicité des grèves de la SNCF n'est pas due à la bêtise, au "ils en veulent trop les salauds", mais à la multiplicité des couleuvres qu'on tente de leur faire avaler depuis une dizaine d'années... c'est ça la tolérance aussi être capable de supporter des choses qui franchement nous agace, il est infiniment plus facile de tolérer des choses qui ne nous ennuient pas.
vive les fautes de français, ça m'apprendra à pas me relire !!
RépondreSupprimerAh mais je suis tout à fait d'accord ! J'ai juste la fâcheuse habitude de chercher des circonstances atténuantes à tout le monde ;). Je comprends tout simplement l'irritation parfois de certains usagers (même si, quand on y pense, on n'a pas à se plaindre, je suis d'accord. Et je souligne le "certains usagers", ceux qui râlent un peu mais ne crachent pas non plus à tout va sur les grévistes), comme je comprends les cheminots et ce pourquoi ils font grève. J'ai bien conscience de leur situation, de cette façon dont on revient constamment sur leurs conditions de travail. Et effectivement, bosser dans ces conditions n'est pas quelque chose que j'accepterais.
RépondreSupprimerEt concernant la façon dont on présente leurs mouvements de grève, il y a une bonne dose de désinformation. C'est facile de décrédibiliser leur action en les présentant comme des privilégiés en voulant toujours plus. Ça entretient beaucoup de préjugés qui ont malheureusement la vie dure, notamment concernant certains corps de métier.
(PS : endroit plus confidentiel = plus de bavardages de ma part. J'espère que ça ne te dérangera pas =) ).
j'ai pas vraiment capté le sens de ton post-scriptum mais c'est pas grave...
RépondreSupprimer___
Je dis seulement, pour résumer tout mon long propos de gauchiste-besancenotiste (que je ne suis pas malgré les apparences !) que ces grèves paraissent injustes à la populasse parce qu'elles sont visibles et que ladite populasse réagit comme un enfant gâté-pourri à qui on retire un de ses "pouvoirs" sur lesquels jamais il ne s'interroge. Il y a des gens qui font fonctionner les trains et ils ne le découvrent que quand ces gens s'agitent. C'est dommage. Mais penser qu'on obtient des choses en distribuant des fleurs et en caressant les gens dans le sens du poil c'est se fourrer un doigt dans l'œil et avoir une vision angélique de la société. Pour obtenir ce que l'on veut il faut perturber les équilibres sinon on passe inaperçu. Le seul truc qui m'agace avec les grèves c'est qu'à chaque fois les porte-paroles des mouvements sont super caricaturaux, limite écervelés et binaires dans leurs discours alors qu'ils "défendent" des principes plus complexes, c'est à ce niveau-là que je vois une erreur de stratégie de communication.