mercredi 5 mai 2010

Mes essentiels : Slowdive - "Souvlaki" (1993)

Ma "rencontre auditive" avec Slowdive s'est faite un peu par hasard, je ne courais pas après. C'était le début des années 90 je crois, j'écoutais des groupes comme Lush qui m'avaient introduit à une sorte de nouveau "son", des ambiances nouvelles pour moi qui ne me nourrissais que de rock bien carré. Je me suis rendu compte qu'il y avait un terme générique pour décrire ce style musical qu'on appelle "shoegaze". Ce terme qui signifie "qui fixe ses chaussures" avait été inventé par un critique musical pour désigner ces groupes au jeu scénique inexistant, tellement timides, qu'au lieu de regarder le public il préférait admirer leurs godasses. Le genre désigne donc de la musique pop-rock enrobée d'ambiances oniriques à l'aide de guitares froides, d'effets d'écho, de "flanger" (une sorte d'effet tournoyant de réverbération), et de chant tamisé souvent aigu et trainant. Bref, un genre musical très connoté, très codifié qui fait la part belle au travail de studio, à l'architecture du son. On pourrait dire que c'est une version "rockée" de la coldwave aussi, comme si The Cure avait un peu amplifié leur son.
Slowdive

Bref, Slowdive s'inscrit donc dans cette tradition en vogue dans le milieu indé des années 90 avec comme partenaires de jeu les déjà cités Lush, Ride, Adorable, Chapterhouse de qui ils sont les plus proches même si dans la famille on peut trouver aussi My Bloody Valentine ou les Boo Radleys. Déjà auteur d'un remarquable album "Just for a day", le groupe anglais sort en 1993 ce magnifique album "Souvlaki", titre aux consonances grecques, (le "souvlaki" étant une brochette grecque, au poulet, à l'agneau, accompagné de légumes ou de riz). Pour moi cet album reste le "double-blanc" du songe, de la mélancholie aérienne, de la légereté qu'on peut parfois discerner dans le mystère. Le groupe s'organisait autour de 3 têtes pensantes : Neil Halstead (compositeur en chef, "lead singer"), Christian Savill (fabriquant du son) et la beauté suprême Rachel Goswell (seconde guitariste et chanteuse). Ouep, comment ne pas tomber amoureux de Rachel Goswell ? Si j'avais été assez con dans ma jeunesse pour mettre des posters d'artistes sur le papier-peint de ma chambre, sans hésiter mes murs auraient été retapissés de portraits de Rachel Goswell !



La grande réussite de l'album tient donc du lyrisme qui émane des ambiances éthérées. La voix de Rachel Goswell est parfaitement mise en valeur (notamment par rapport au premier album où elle était plus en retrait) et se fait le contrepoint de charme des agréables sonorités chaudes du timbre d'Halstead. L'album s'ouvre sur "Alison", une sorte de slow liquide, apaisé et trainant qui donne déjà sa couleur à l'album, l'oreille est prise dans un coton doux, la mélodie est tout de suite facile à retenir. A la différence de My Bloody Valentine, le "propos" musical de Slowdive est moins biscornu, plus spontané. De fait, l'album n'est qu'une suite magnifique de songes nostalgiques, doux, qui enveloppent l'auditeur dans une sorte de petite lévitation. Idéal pour calmer ses nerfs, on tartine l'âme avec "Machine gun", on s'envole loin avec le bourdonnant "40 days", on se caresse l'esprit avec les rayons de "When the sun hits". On est troublé par l'émotion acoustique, dépouillée, d'un de mes morceaux favoris (tout artiste confondu) "Dagger", qui vous prend à la gorge, comme une hésitation à pleurer d'on ne sait trop quoi.
"Souvlaki" est l'album qui m'a donné envie de connaître plus en amont le "shoegaze", de travailler le rêve. Je me suis rendu compte aussi que ce type d'album fonctionnait comme un médicament pour moi, de nombreuses fois j'ai pu l'écouter pour tenter de m'extraire de quelques jours médiocres. Cet album, oui, c'est un baume.

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