mardi 8 juin 2010

Mes essentiels : Autour de Lucie - "Immobile" (1997)

Autour de Lucie est un groupe de poprock français mené par Valérie Leulliot et pas Lucie ; le groupe est en stand-by depuis quelques années, je ne sais pas vraiment s'ils se sont séparés mais plusieurs membres du groupe ont continué à faire du chemin seul. Parler d'un groupe est un peu impropre vu que la formation n'a cessé d'évoluer au fil des albums, la pièce centrale qui n'aura jamais bougé c'est la chanteuse (auteure des textes).

Quand "Immobile" est sorti, j'étais pas trop dans le truc rock français... euh, non, je vais la réécrire cette phrase façon critique musical... hmm... "quand le 2è opus d'Autour de Lucie est sorti dans les bacs je n'étais pas trop dans le trip rock en français" (important de dire "opus" et "bacs")... ça sonne mieux ? Tout juste je me frottais à des trucs un peu "décalés" genre Diabologum ou m'en remettais aux références solides de Noir Désir, Mano Negra et autres alternatifs de tout poil. J'avais eu une oreille distraite sur le premier album du groupe "L'échappée belle" sorti 3-4 ans avant, je me rappelle avoir vu le clip de "L'accord parfait" sur M6 plusieurs et je jugeais assez définitivement et sévèrement que c'était vraiment trop nunuche comme type de musique. De la musique pour midinette avec des étoiles dans les yeux. Bon, je n'étais pas formé à la pop et tout ce qui ne dégageait pas de testostérone avait tendance à me perturber en matière de musique à guitare. Plus tard, je reverrais alors mon jugement et reconnaitrais que le premier album d'Autour de Lucie avait ce sucre agréable, cette légèreté insouciante (quoique) idoine à soulager les moments à risques d'ennui de passables dimanches. 

"Immobile" revendique donc, si l'on peut dire, une approche pop comme son prédécesseur... il est là le couplet, il est là le refrain, elle est là la voix fluette. Cette voix d'ailleurs, dans son aspect élégamment monocorde et aérien, n'est pas sans rappeler parfois le timbre de Françoise Hardy. Bref, une approche "sucrée", encore des dimanches pour oublier l'ennui, dans cette production. Mais à côté de cette caresse surgissent des éclairs plus rock, ne serait-ce que dans la production même des morceaux ; en effet, le sucre de la composition se voit imbibé de l'acidité et du crayeux de quelques belles saturations guitaristiques... flèches dans la chair sensées souligner une tension, un "quelque chose" que l'étude des paroles nous fait comprendre, nous fait saisir. "Immobile" est un album de tension, mais pas la tension malsaine dont j'avais parlé pour l'album de Battle of Mice... non c'est tout le non-dit contenu dans la complexité des rapports humains. Tout cela est dit joliment, simplement, le recours aux métaphores et ne tombe pas dans l'expérimentation imbécile du "je vais vous parler de quelque chose mais vous n'allez rien y comprendre". 

 
L'album s'ouvre sur "Selon l'humeur" un titre court mi-chanté mi-parlé qui donne déjà la couleur du reste, nerveux et sage à la fois et finement arrangé. On se rend bien compte aussi que l'on va parler de choses pas forcément drôles mais sur un mode pas forcément sinistre et c'est en ça que le pari de cet album est gagné. L'album traite des relations de couple, notamment quand l'ennui s'installe, quand la routine devient plus forte que tout, que l'immobilisme ravage tout sur son passage. Tantôt cet immobilisme se fait atout, arme de séduction, bonheur du moment comme le décrit le morceau "Immobile", tantôt il devient un venin qui étaye les frustrations comme dans "Chanson sans issue". On force les apparences "qui semblent nous soutenir à jamais" jusqu'à se mentir à soi, à elle/lui, aux autres, à tout le monde... c'est toute cette fatalité presque légère qui transpire dans le morceau "La vérité (sur ceux qui nous mentent)", morceau d'abord calme qui prend de l'ampleur à mesure que les guitares arrivent comme des flashs de culpabilité. Enfin, le morceau "Les promesses" (ci-dessus) renvoient à des choses si "simplement compliquées" ai-je envie de dire lorsque dans les meilleurs moments on conclut des pactes solennels avec tout le monde, qu'on sait qu'on ne pourra jamais honorer et qui reviennent à la tronche de l'imprudent qui les a acceptés... En guise de conclusion, je dirais que le tour de force du groupe est d'avoir réussi à complètement assumer le chant en français qui, pour l'époque au milieu des années 90, relevait du vrai courage pour ce genre de musique... les sujets traités dans l'album sont des plus convenus, les paroles assez simples au final mais le tout a une sorte de grâce, de finesse et d'humilité un brin "arty" qui me plaît. Le groupe étant assez goûté par les mélomanes indé de tout poil dans le monde entier d'ailleurs. Même si j'imagine qu'en France à peu près 0,4 % de la population connaît Autour de Lucie !

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