mardi 18 mai 2010

Instantané sévillan - IV

Il m'a fallu atteindre la trentaine pour assister à ma première corrida. Autant dire que je ne me retrouvais pas dans le cadre le plus dégueulasse puisque j'allais assister à ça dans les prestigieuses arènes ("plaza de toros" en version originale) de Sevilla. Sur les 18h30 / 19h après avoir acheté des places au marché noir auprès d'un Sévillan qui arborait un chapeau Stetson et un accent andalou épais à trancher au couteau, on prenait place en plein soleil sur les gradins. Une corrida c'est 3 toreros, 6 taureaux. Le torero (une fois entré) a environ 20 minutes pour en finir avec son taureau, on lui donne une idée du temps qui passe à l'aide de l'orchestre à trompettes des arènes qui joue deux ou trois mesures sensées l'aviser à propos. Première étape : quelques mecs armés de muletas (le chiffon rouge qu'on agite) excitent le taureau, le font balader dans les arènes, le font courir un peu pour l'épuiser et le présenter au public (de 9 à 99 ans, en général tous spécialistes). Sympa, on se croirait dans "Intervilles" avec les costards rose et bleu en moins. Deuxième étape, l'entrée de picadores sur cheval qui, avec soin et précision, enfoncent leur lance aiguisée, épaisse comme un poing, entre les "omoplates" de la bête, touchant un nerf crucial. Le taureau est déjà bien affaibli, a beaucoup moins de fougue et de superbe mais continue à courir comme il peut autour des gars restés pour agiter les muletas. Troisième étape : après un quart d'heure, l'entrée, sous les vivas, du torero (ben oui, il n'était pas encore là), en "habit de lumière", avec sa grande muleta. Face au taureau déjà bien calmé il enchaine les "passes", tantôt un genou à terre, tantôt en se courbant en admirant son propre postérieur avec des mimiques marquées, tantôt en levant le bras au ciel, sous les applaudissements et les "oh" des spécialistes dans l'assitance. Quatrième étape, les assistants du torero, placés autour de la piste de sable (sable se dit "arena" en espagnol) viennent au "secours" du torero en plantant des banderilles dans la bête qui pousse des cris de douleurs, se pisse dessus (comme on le voit sur la photo), pisse le sang et bave entre deux vacillements. Cinquième étape : on passe l'épée au monsieur. Il fait quelques passes sous la musique, les "olés" et d'un coup plante l'épée dans le corps déjà bien entamé du taureau. Ce dernier meurt, on applaudit le torero qui salue la foule, des personnes sortent le cadavre taurin des arènes en le trainant par la queue. Pour être franc, autant avant d'assister à une corrida en vrai je trouvais ça barbare, autant après j'ai trouvé ça pire que barbare... une vraie boucherie insupportable. Quand on entend la bête gémir de douleur, à l'agonie, qui continue à défier le torero, ça fiche un coup. Normalement une corrida c'est 6 taureaux, au bout de 3 on a sa dose. Mais au moins, maintenant, je pourrai critiquer en sachant de quoi je parle...
Corrida dans la Plaza de Toros de Sevilla (Espagne, Andalousie, avril 2008) (c) p.o.v.

5 commentaires:

  1. j'ai failli, parce qu'on m'y a invité, à Nîmes il y a longtemps, je n'ai pas pu... le principe même me révulse... et ce qu'on m'en a rapporté (à savoir la même chose que toi) me conforte dans cette idée...

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  2. ça la foutait mal d'être prof d'espingouin, de parler art taurin et traditions sans avoir jamais vu ce "spectacle"... franchement horrible, vraiment pire que le pire que je pouvais imaginer. C'était dur de ne pas détourner les yeux, et la plupart du temps je le faisais... sauf pour prendre quelques photos "souvenir" du moment... en effet, nul intérêt à aller voir un tel massacre, véritablement. Dommage parce que la culture qui s'y rattache est très riche.

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  3. Je n'arriverai jamais à assister à une corrida... Ce procédé me bouleverse au possible. Rien que le fait de lire ce que tu en dis me donne la nausée. C'est beau, l'être humain.

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  4. ben disons qu'il y avait pour moi une curiosité et aussi un "besoin" quasi professionnel de vivre une "corrida"... parce que parler des traditions d'un pays sans les avoir goûtées n'aident pas vraiment à avoir du recul ou, au contraire, de la passion à leur égard. Maintenant oui, je peux assumer ce que je dis tout en restant assez fasciné par les arts taurins, ce qui tourne autour de la corrida mais évidemment je suis à fond contre la corrida en soi... bref...

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  5. Mon dieu , quelle horreur. Je me suis toujours demandé comment les gens faisaient pour aller à des corridas , et à apprécier ça. Peut-être l'admiration pour le torero et tout ça , mais , c'est une pure boucherie , comment peut-on ne rien ressentir & apprécier le cri d'un taureau qui agonise ? Je n'comprendrais jamais..

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